mercredi 27 janvier 2010

Les aléas du direct


Une dizaine de jours par mois, je tiens une chronique de 5 minutes sur une radio nationale avec laquelle mon journal a un partenariat. Cela se passe à distance, dans une petite cabine insonorisée avec une connection sécurisée. Cela fait maintenant trois ans que je cause dans le poste... Et pourtant, c'est toujours une abondante source de stress.
C'est tôt, très tôt... Si je ne suis pas levée à 6 heures, cela s'annonce mal et si je n'ai pas quitté la maison à 6h45, je vais au devant de graves ennuis. Mes petites affaires sont prêtes la veille au soir - ce n'est pas ce jour-là que j'ai le temps de faire la coquette et d'essayer un assemblage pointu.

7h15, je suis devant mon ordinateur.
le thème a été décidé la veille avec le présentateur de la matinale, mais la chronique contient une bonne part d'actualité. Il me faut donc, en une demie heure chrono, dépouiller la presse, les fils d'agence, faire un petit brainstorming avec mon collègue de permanence, affiner un angle, écrire, d'une manière aussi claire que possible pour éviter les euhhhh à l'antenne, mais pour que mon texte ait l'air à la fois maîtrisé et naturel... Et autant que faire se peut être pétillante et pleine d'entrain.
Et tout ce temps là, j'ai peur : peur que la liaison soit rompue, peur de ne pas trouver mes mots, peur de passer à côté du sujet, peur du lieu commun, ou de l'erreur sur les faits...Ou pire, peut de ne pas être à l'heure dans ma petite cabine. Un blanc, même de 10 secondes, en radio, c'est long... Mais c'est une peur stimulante, agréable, une tension délicieuse. Comme un rendez-vous. J'ai rendez-vous avec des gens qui se rasent, des gens dans les embouteillages, des auditeurs attentifs et d'autres, plus réticents, que je vais essayer de mettre dans ma poche.

Alors, je me prépare.
Ce moment est rare et suspendu. La rédaction est déserte, à part la dame du ménage, un permanencier et une souris qui en profite pour piller nos réserves de chocolat. L'open space est plongée dans la pénombre. Je prends mon premier thé de la journée pour essayer de m'éclaircir la voix, j'écris, je lis à haute voix, je reformule si une phrase me fait buter (règle numéro un : ne jamais s'acharner sur une phrase qui ne veut pas passer).

7h45 : Coup de feu, je suis fin prête, lance une impression en gros caractères de mes notes, je connecte la ligne, mets mon casque, règle le micro, vérifie les niveaux sonores, le retour. Petit test de voix avec le technicien. Je lui transmets le lancement pour que le présentateur sache où je l'emmène.

C'est parti. C'est du direct. Une inspiration et 5 minutes en apesanteur, à appuyer mes mots de grands gestes dans mon bocal. Je prends mon texte à bras le corps, j'essaie de lui donner vie, de le mener à son terme sans faiblir, en respirant comme un sportif, en posant ma voix pour qu'elle ne parte pas dans les aigus.

C'est fini. La tension retombe. La rédaction se peuple, le jour se lève, la magie du direct s'estompe doucement, jusqu'à la prochaine fois.

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